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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
crivant d’économiser les troupes en ligne en perfectionnantles organisations défensives, et de constituer des réservespartielles.
Les commandants des grandes unités n’entrèrent d’abordque timidement dans la voie que je leur traçais. Il semblaitqu’on ne pût défendre les tranchées qu’en les garnissantd’hommes coude à coude derrière les parapets. Aussi, lespremières réserves constituées dans les armées ne se com-posèrent d’abord que de petites unités qui présentaientplutôt le caractère de réserves de corps d’armée. Auxarmées du Nord, la densité des troupes permettait de pousserplus loin encore la création des disponibilités, et de cons-tituer en dehors des réserves d’armée des réserves de groupesd’armées, qui comprendraient « des unités très vigoureusesplacées à proximité des points sensibles (1)... » D’autrepart, les disponibilités pouvaient être encore accrues parl’emploi sur le front d’unités territoriales qui libéraientautant d’unités d’active ou de réserve.
Enfin, je donnai au général Foch mission de demanderau maréchal French, dont les forces s’étaient sensiblementaugmentées, et qui avec quatre corps d’armée tenait unfront de 50 kilomètres, alors qu’un grand nombre de noscorps d’armée tenaient des fronts allant jusqu’à 20 kilo-mètres, de relever la 8 e armée française intercalée entreles Anglais et les Belges. A vrai dire, cette relève, à la-quelle le maréchal n’opposa aucune objection de principe,ne commença à s’opérer très lentement qu’à partir de lafin de décembre.
Néanmoins, vers la fin de novembre, nos organisationsdéfensives commençaient à se perfectionner ; dans chaquearmée, l’effectif des troupes disponibles était en voie d’aug-mentation ; les réserves de groupes d’armée comprenaientdeux divisions d’infanterie, deux divisions de cavalerie,deux divisions territoriales. La cavalerie, qui avait ététransportée dans les Flandres, avait repris sa place dansl’ordre de bataille normal : les deux corps de cavalerie
(1) Lettre n° 4103 du 17 novembre 1914.