CHAPITRE VI
Mes relations avec la politique en 1916. — Mon départ.
J’ai résumé, à la fin du chapitre consacré dans ces Sou-venirs à l’année 1915 (1), les relations que j’avais eues avecla politique au cours de cette année, et comment, le 2 dé-cembre, un décret rendu par le président de la Républiqueavait étendu mes attributions et renforcé mon autorité.
Mais je ne gardais pas l’illusion que les difficultésdussent pour cela cesser dans mes rapports avec la poli-tique.
La guerre durait depuis dix-sept mois et menaçait dese prolonger longtemps encore. Les pertes humaines subiesdepuis le début de la guerre, les souffrances et les dangersendurés par les habitants de la zone des armées, les mauvaistraitements et les actes de barbarie infligés à nos malheureuxconcitoyens des régions envahies, les restrictions de toutessortes supportées par l’ensemble de la nation causaient,en se prolongeant, un état de malaise croissant. La pre-mière moitié de l’année 1916, avec la longue angoisse deVerdun, mit, par surcroît, à une rude épreuve les nerfsdes Français.
Si cet état d’esprit était compréhensible, il constituaitun double danger.
Dans une guerre comme celle que nous menions, lemoral de la nation était un élément essentiel de victoire.S’il ne dépendait pas de moi, mais de l’action gouverne-mentale de le soutenir, par contre (et c’était là le second
(1) 3 e partie, chap. v.
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