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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
la région où notre effort principal se produirait. Je pres-crivis, le 16 décembre 1915, aux généraux commandantles groupes d’armées, de procéder à des études prépara-toires dans une série de secteurs qui semblaient convenirau développement d’une puissante offensive. A l’origine,je ne tenais pas essentiellement à ce que le terrain de notreoffensive fût jointif à celui de l’attaque britannique. Sila conjonction de nos efforts pouvait présenter d’incon-testables avantages, l’expérience des batailles de 1915m’avait révélé qu’il était assez difficile de faire marcherdu même pied des troupes anglaises et des troupes fran-çaises ; et surtout, je ne voulais pas, en paraissant imposerà nos alliés le théâtre de la lutte, qu’ils puissent me repro-cher, en cas d’insuccès, d’avoir limité leur liberté.
Quant aux offensives préventives que j’attendais del’armée britannique pour user, avant l’action décisive,les vingt-cinq divisions que l’ennemi, d’après nos calculs,paraissait avoir en réserve sur le front occidental, le com-mandement allié n’était pas très fixé sur la manière deles réaliser.
Le général D. Haig pensait qu’il était possible d’ob-tenir cette usure de l’ennemi au moyen de nombreusespetites attaques partielles, entreprises dès le printempssur tout le front, tant français qu’anglais , et renouveléesjusqu’au moment de l’attaque générale.
Les généraux Butler, sous-chef d’état-major, et Da-vidson, chef du 3 e bureau, admettaient que l’usure desréserves stratégiques allemandes ne pourrait être réaliséeque par deux ou trois attaques préalables exécutées sur desfronts de 20 à 30 kilomètres en des secteurs éloignésde ceux choisis pour l’attaque générale afin d’y attirerles réserves ennemies. A leur avis, ces attaques préalablesdevraient précéder de 8 à 15 jours l’attaque généraledont elles constitueraient la phase préparatoire.
Cette dernière conception présentait un inconvénient.L’armée britannique n’était pas assez riche en artillerielourde pour lui permettre d’équiper tous ces fronts d’at-taque simultanément. Et alors les actions préparatoires