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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
Par suite des moyens réduits affectés au début del’offensive française, l’action principale devait être exécutéepar les armées britanniques, la mission de la 6 e arméefrançaise étant d’appuyer nos alliés. Dans ce but, elledevait opérer à cheval sur la Somme, en liaison avec la6 e armée britannique, en étendant la droite de sonattaque au sud de la rivière jusqu’à la route Amiens- Péronne. Mais l’action au sud de la Somme devait viserseulement à prendre pied sur le plateau de Flaucourtpour empêcher l’artillerie ennemie de cette région d’agirpar ses feux de flanc contre les troupes progressant au nordde la rivière. L’action au nord de la Somme, au contraire,nécessairement réduite au départ en raison de la disposi-tion du terrain, devait être développée au fur et à mesuredes progrès anglais et alimentée pour être poussée aussiloin que possible en liaison avec eux.
J’avais prévu que le déroulement de notre offensive aunord de la Somme ne tarderait pas à absorber l’attentionet les forces de la 6 e armée, qui aurait à progresser versle nord en liaison avec la 6 e armée anglaise, tout enmaintenant l’occupation du terrain face à l’est. Ces deuxmissions risquant de devenir difficiles à remplir simultané-ment, j’avais retiré, le 24 juin, l’état-major de la 3 e arméedu front de l’Argonne, et je l’avais mis à la disposition dugénéral Foch. Le général Humbert, commandant la 3 e arméeavait alors reçu le front passif de l’Oise ; le général Mi-cheler (10 e armée) avait pris à son compte toute la partiedu front où on ne prévoyait d’opérations qu’en cas dedéveloppement de l’action vers le sud. Et la 6 e arméen’avait plus gardé comme front que celui sur lequel nousdevions attaquer.
Le général Fayolle qui allait jouer dans cette batailleun rôle de premier plan, était, quand éclata la guerre,général de brigade au cadre de réserve. Il avait été pro-fesseur du cours d’artillerie à l’École de guerre, et s’y étaitfait la réputation d’un homme au sens droit, aimant lessolutions simples, ennemi de la réclame, laborieux etconsciencieux. Quand l’heure de la retraite avait sonné,