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MÉMOIRES DD MARÉCHAL J OFFRE
nous, il baissait, on peut le dire, à vue d’œil. Le nombredes prisonniers que nous faisions, le nombre d’officiers quise rendaient, leur attitude, tout dénonçait la lassitude et ledécouragement avant-coureur de la défaite.
Mais si notre effort devait se poursuivre, il était clairque, sur le front français, c’était surtout aux Anglais qu’ilfallait demander de l’intensifier. J’ai déjà dit les préoccu-pations que me causaient nos effectifs. Nos pertes àVerdun , du 21 février au 15 août, s’étaient élevées à7 317 officiers et à 299 000 hommes (1). Du 1 er juillet aumilieu de septembre, la Somme nous avait coûté en chiffresronds 80 000 hommes. Le 10 septembre, j’avais reçu unmémorandum du général Robertson, chef d’état-majorimpérial, sur la conduite à tenir par la coalition, et con-cluant à une offensive continue sur le front occidental,tant que le permettraient les conditions climatériques. Lelendemain, saisissant la balle au bond, je lui avais répondutélégraphiquement que nous étions d’accord, mais que jecomptais surtout sur les armées anglaises pour intensifierl’effort, et je lui suggérais d’étendre le front anglais poursoulager un peu la fatigue des armées françaises. Ce faisant,je savais que je demandais de nouveaux sacrifices à unearmée qui sur la Somme avait déjà perdu 250 000 hommeset 12 000 officiers. Mais je pensais que ces sacrifices pou-vaient, en bonne justice, être demandés à une armée quicomptait maintenant en France, environ 1 500 000 hommes.Dans l’ordre matériel, l’armée britannique était également
( 45 000 tués.
(1) Se décomposant en j 163 000 blessés.
f 91 000 disparus.
299 000
Depuis le début de 1916, les pertes des armées françaises s’éle-vaient donc (en tués, blessés, prisonniers et malades) à un chiffrequi n’était pas inférieur à 400 000 hommes. Or, la bataille de laSomme n’était pas finie, et je dirai tout à l’heure que la nécessitéde rétablir la situation à Verdun allait nous amener à y entre-prendre des offensives de dégagement qui, si bien menées qu’ellespussent être, ne seraient pas sans causer encore quelques pertes.