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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
les plus délicates. Mais ce n’était évidemment là que desprojets que des spécialistes, venus après nous, seraientseuls aptes à mettre au point.
Pendant ce temps-là, M. Baker et les fonctionnaires duministère de la Guerre, le général Scott et l’état-majorgénéral travaillaient nuit et jour à traduire en projetsadaptés au milieu américain, c’est-à-dire à ses lois et à sescoutumes, les plans d’ensemble que je leur avais présentés.Le président de l’Union, M. Wilson, se faisait tenir aucourant très exactement de l’état d’avancement des tra-vaux du secrétaire d’Ëtat de la guerre. Quand il se futbien pénétré de ces questions militaires, qui jusque-làlui étaient probablement restées complètement étran-gères, il me fit demander de venir le voir.
Je fus reçu à la Maison Blanche, le 2 mai, à 16 heures.Le colonel Cosby nous servit d’interprète et rédigea denotre entretien un compte rendu très fidèle dont il meremit copie.
Le Président, après s’être félicité de pouvoir s’entretenirun petit moment avec moi, commença par me demanderquelle devait être, à mon avis, la conduite de l’armée amé-ricaine.
Je lui fis d’abord observer que la puissance militaire del’Allemagne baissait progressivement et qu’elle venait demobiliser sa classe 1918, dont une partie avait déjà parusur le front ; ce qui allait lui donner un appoint de400 000 hommes, mais ce qui montrait qu’elle consommaitses jeunes soldats avec une avance d’un an, ce qui étaitbien un signe d’épuisement. Sur une question du Prési-dent, je reconnus, que, nous aussi, nous venions d’appelersous les drapeaux notre classe 1918 qui nous fournirait170 000 hommes instruits, mais qu’on s’efforcerait de nepas engager trop tôt ce contingent.
Après quoi, je dis que la question essentielle pour lesÉtats-Unis était d’envoyer le plus tôt possible une divi-sion en France , afin que le drapeau américain flottât dansle plus bref délai possible côte à côte avec les étendardsalliés.