■* • \A'r V. ^'-jV'V^ii*/-;
30
MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
La réponse du ministre (1) ne fut pas encourageante.Elle me faisait connaître que le programme des fabricationsen munitions de tous calibres que je lui avais adressé, attei-gnait, et même dépassait peut-être, la limite des moyens deproduction dont nous disposions, même en utilisant tous lesconcours possibles de l’étranger. Une partie notable descommandes, notamment celle des obus en acier et fonteaciérée de 155, n’avait pu être placée. Le ministre insistaitsur ce fait que le rendement en munitions d’artillerie denos fabrications, en commande en France et à l’étranger,touchait au maximum possible. La limite qu’il indiquait(notamment 3 000 pour le 155, tant en acier qu’en fonteaciérée, qui ne serait réalisée qu’au 1 er avril 1915) devaitêtre tenue pour atteinte tant qu’un nouvel outillageexigeant plusieurs mois d’installation n’aurait pas été misen œuvre. Le ministre me signalait, en outre, la pénuried’explosifs pour le chargement des projectiles fabriqués.
L’importance de cette dépêche ministérielle mérite d’êtresoulignée. Elle constituait, en effet, une fin de non-recevoiravant la lettre à toute demande ultérieure d’augmenta-tion de production des munitions de gros calibre. Elle apesé pendant plusieurs mois sur mes décisions, car jesentais l'inutilité de renouveler des demandes vouéesd’avance à l’insuccès, tant que je n’aurais pas été aviséd’une modification dans les possibilités de notre industrie.Et le rendement des productions journalières pendant lesmois de mars et d’avril qui fut nettement inférieur auxprévisions, n’était pas de nature à modifier mon étatd’esprit.
Le 3 mai 1915, comme je venais d’apprendre la décisionprise récemment par le ministre de reconstituer le demi-approvisionnement des munitions de gros calibre du Gouver-nement militaire de Paris sur lequel j’avais toujours crupouvoir compter, je signalai (2) l’imminence de l’épuisementdes stocks sur lesquels on vivait depuis le début de la
(1) Lettre n° 13164 du 7 février 1915.
(2) Lettre n° 5082 du 3 mai 1915.