LES OPÉRATIONS EN 1915
SI
déclaration en expliquant que le gouvernement se gar-derait soigneusement de s’immiscer dans la direction desopérations, et qu’il se bornerait à examiner les conditionsgénérales dans lequelles l’affaire serait engagée. Cette me-sure, ajoutait-il, ne devait en aucune façon être considéréecomme une marque de défiance à mon égard, le gouverne-ment restant à l’unanimité plein de confiance en moi.
Au cours de cette audience, le président de la Républiqueaprès avoir examiné la situation politique intérieure del’Italie où le parti giolittien reprenait la lutte contre le gou-vernement, et celle des Balkans qui commençait à s’assom-brir, en vint à parler de la situation parlementaire fran-çaise. Il dit que la personnalité de M. Millerand était for-tement combattue, et qu’en attaquant le ministre de laGuerre, c’était moi que l’on visait. M. Albert Sarraut déclaraaussitôt que, de toutes les conversations qu’il avait eues avecles membres du Parlement, il résultait qu’en aucune façonma personne n’avait été mise en cause, et qu’au contrairetous s’accordaient à déclarer que ma réputation tant àl’extérieur qu’à l’intérieur était l’indice d’une confianceunanime. Après avoir passé en revue les différents groupespolitiques du Parlement, M. Poincaré et M. Sarraut envinrent à conclure, que le seul homme politique qui eûtréellement pris parti contre moi — j’en ai déjà parlé ailleurs— c’était M. Doumer. Et le Président déclara, de bonnegrâce, qu’une crise dans le haut commandement serait lachose la plus grave à imaginer, que j’étais absolumentindispensable , que ce serait un danger national de toucherà moi, et que pour sa part il ne consentirait jamais à ceque le haut commandement fût atteint.
Les échos fidèles de cette longue audience, sur laquelleje reviendrai dans un prochain chapitre, quand je résu-merai mes relations avec le gouvernement et le Parlementpendant cette année 1915, me trouvèrent à mon quartiergénéral en train de préparer la bataille dont j’ai déjà in-diqué le dessein. Les propos du Président étant en sommeassez contradictoires, il ne convenait pas que j’en fisseétat pour poser au gouvernement la question de savoir si