l’affaire sarrail
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trop souvent des paroles de blâme, ce qui ne contribue pas àcalmer l’énervement du général Duchêne.
On est forcé de reconnaître que les relations entre l’arméeet le 32 e corps, et entre le corps d’armée et les unités inférieures,manquent de confiance mutuelle. Los inférieurs arrivent mêmeà taxer certains actes de « brimades ». Il en résulte une sortede malaise qui s’ajoute à la fatigue physique et à la tensionnerveuse produite par l’âpreté de la lutte.
Le général Sarrail a la plus grande confiance en son chefd’état-major; il lui accorde une initiative qui a pu paraîtreexagérée au point de vue tactique et technique. Par contre,le commandant de l’artillerie de l’armée et le commandant dugénie sont inutilisés.
Le colonel Lebouc est un chef d’état-major d’intelligenceet de capacités supérieures. Il a beaucoup de sang-froid, unmoral très solide, et il exerce à ce point de vue une heureuseinfluence sur son général d’armée. Il connaît bien le théâtred’opérations de l’armée, et il est inexact de dire qu’il n’ajamais fait de reconnaissance sur le terrain. Il sort peu, envérité, mais je sais, par exemple, que, lors des dernières attaques,il est allé s’entendre au préalable avec le commandant du32 e corps, et qu’il a personnellement contribué à établir lesliaisons entre l’artillerie et l’infanterie.
Le colonel a une grande confiance en lui-même et supportemal la contradiction. Il rédige de sa main tous les ordres etcomptes rendus sans presque utiliser son 3 e bureau, qui parfoisn’aurait appris certaines opérations en projets que par lescorps d’armée. C’est ce qui expliquerait le défaut de pré-paration de quelques études ou opérations.
Il existe un manque de confiance réciproque entre le chefd’état-major et ses officiers : le chef du 3 e bureau particulière-ment ne se sent pas toujours traité avec grande bienveillance.
Quant au sous-chef, il est à peu près inutilisable, ce quiréduit encore le rendement de cet état-major.
Au point de vue de son personnel, le général Sarrail s’entêtedans cette idée étrange qu’on prend généralement la contre-partie de ses propositions. C’est pour cette raison qu’il se refuseparfois à donner son appréciation sur ses subordonnés et qu’ils’abstient de demander le remplacement d’officiers jugés infé-rieurs à leur tâche.
On ne saurait évidemment approuver une pareille attitude.