LA GUERRE ET LA POLITIQUE
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en chef que l’on devine chez tout le monde, des simplessoldats aux généraux (1)... »
La même note me revenait d’une manière officielle cettefois, au mois de décembre. Le ministre des Affaires étran-gères me communiqua un rapport (2) adressé le 16 dé-cembre par M. Klobukowski, ministre de France prèsle gouvernement belge, dans lequel on lisait :
Le roi ayant appris ma venue, le 8 (décembre), voulut bienme faire connaître qu’il me recevrait dans l’après-midi. Sonaccueil, ordinairement très cordial, fut cette fois empreintd’une nuance affectueuse qui me toucha.
Le roi avait sur sa table l’album de photographies que luiavait remis un instant auparavant le colonel Génie de lapart du général en chef, et qui relatait les divers épisodes deson voyage sur notre front : « C’est là, me dit-il, un souvenirprécieux. Je revis en parcourant cet album une période où jen’ai ressenti que des impressions satisfaisantes. L’aspect del’armée française a été pour moi un émerveillement. A aucunmoment, l’histoire du monde n’a donné un pareil spectacle :des soldats qui, après un an de guerre, et quelle guerre 1 sontfrais, dispos, admirables d’entrain et de cette bonne humeurfrançaise qui réjouit l’âme. On ne peut douter de la victoire,lorsque, les ayant vus dans une forme aussi magnifique, on seremémore les phases terribles par lesquelles ils ont passé ;vraiment, l’effort accompli par la France parait surhumain ;elle a supporté le plus lourd poids de la campagne, et avec uneénergie une telle maîtrise que tout éloge que l’on fera d’ellesera toujours en dessous de la vérité. »
Le roi en vint tout naturellement à me parler des récentsdécrets (3) sur le commandement en chef des armées françaisesqu’il considère comme une excellente mesure, justifiée, tantpar la confiance que le général Jofîre inspire, non seulement àl’armée française, mais aux alliés, que par la nécessité long-
(1) Dossier strictement personnel du général commandant enchef, t. II, cahier 3, pièce 19.
(2) Rapport n° 367 adressé le 16 décembre 1915, à M. Briand,président du Conseil, ministre des Affaires étrangères, par M. Klo-bukowski, ministre de France près le gouvernement belge.
(3) Le roi faisait allusion aux décrets dont on trouvera le texteà la fin de ce chapitre.