Druckschrift 
2 (1932)
Entstehung
Seite
144
Einzelbild herunterladen
 
  

144

MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE

temps reconnue de réaliser lunité de direction. Elle ne sauraitêtre en des mains plus prudentes ; le mérite du généralissimeest davoir su ménager ses effectifs au point quils constituentà lheure actuelle, et quils constitueront surtout, après le tra-vail de réfection générale qui se poursuit, une armée plus fortequau commencement des hostilités.

La victoire de la Marne, lattitude défensive à laquellelarmée allemande se voyait maintenant contrainte avaientfait également une forte impression sur les autres, quiétaient tous plus ou moins dominés au début du conflitpar la croyance à la supériorité de la force allemande.Cest ainsi que dEspagne nous ne comptions pas quedes amis, notre attaché militaire me signalait lestimedans laquelle le roi me tenait (1).

Mais, à mesure que la guerre se prolongeait sans ré-sultat apparent, lopinion publique sinquiétait. Cette guerresi intense dans son immobilité avait, dailleurs, je le re-connais, de quoi ébranler les nerfs .les plus solides. AuParlement et dans les commissions, linquiétude se mani-festait sous les formes les plus variées. Les uns reprochaientau commandement français de navoir pas encore trouvéune solution décisive pour chasser lennemi de notre sol.Dautres lui faisaient un grief de se livrer à des attaquespartielles qui ne nous permettaient pas dutiliser la supé-riorité de nos effectifs. On sinquiétait aussi des libertésque le ministre de la Guerre mavait laissé prendre ; oncritiquait ma correspondance directe avec les commandantsen chef alliés ; on me reprochait de nommer moi-même auxgrands emplois des armées en campagne et de retirerleur commandement aux généraux qui me paraissaient

(1) Extrait dune lettre du colonel Tillion, attaché militaire auprèsde lambassade de France à Madrid , en date du 22 février 1916 :

« Mon général, comme vous le constaterez en lisant mon rapportdu 17 février relatif à mon audience du roi dEspagne , Sa Majestéma chargé de vous transmettre lexpression de son admiration.Cest la troisième fois que le souverain me parle de vous en termesparticulièrement chauds et élogieux.. »

(Dossier strictement personnel du général commandant en chef,t. II, cahier 3, pièce 67.)