LA GUERRE ET LA POLITIQUE
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encore fallait-il la mettre en pratique chez nous-mêmes.M. Briand s’y employa avec une habileté à laquelle il fautrendre hommage.
Tout d’abord, il s’agissait de délimiter les attributionsdu ministre de la Guerre, et celles du commandant enchef. J’en traçai moi-même au président les grandeslignes :
J’assumerais le commandement en chef de toutes lesarmées françaises, quel que soit le théâtre sur lequel ellesopéreraient. Pour me soulager de ma tâche ainsi étendue,je prendrais auprès de moi un officier général qui traiteraitles affaires courantes, me remplacerait pendant mesabsences et que je pourrais déléguer sur les fronts où monaction de direction aurait à se faire particulièrementsentir.
Le ministre de la Guerre resterait chargé de toutes lesressources de l’intérieur (recrutement, instruction, fabrica-tion) et de l’envoi de ces ressources sur les différentsthéâtres, d’après les données d’emploi que je lui fournirais.
Le président de la République et le président du Con-seil étaient acquis à cette idée.
Il n’y avait plus qu’à la faire partager par Gallieni à quion avait décidé, entre temps, de confier le portefeuille dela Guerre.
Tout d’abord, lorsque le ministère fut constitué, le30 octobre, M. Briand me fit demander de venir le voir.J’étais rentré le 31 de Londres . Je vins, dans la soirée de cejour-là, aux Affaires étrangères, où je retrouvai Gallieni.Le président du Conseil nous dit qu’avant toutes choses,il fallait que nous fussions bien d’accord, Gallieni et moi,et pour sceller cette union, il nous demanda de nousembrasser devant lui, ce que nous fîmes de bon cœur (1).
(1) Le 29 octobre, le général Gallieni qui venait d’accepter leportefeuille de la Guerre, m’avait écrit :
« Mon cher Joiïre,
« Les circonstances actuelles ne me permettent pas de me scus-traire à un nouveau devoir.
« Vous savez que vous pouvez compter sur moi, comme jadis à