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2 (1932)
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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE

Le 20 décembre, French vint me faire ses adieux : cestavec émotion que je lui serrai les mains ; il avait été lecompagnon des heures les plus sombres de la guerre, etje ne pouvais oublier avec quelle loyauté il avait toujoursaccompli ce quil avait promis : je lui remis la croix deguerre devant un bataillon de zouaves. Deux jours après,je recevais la première visite du général Haig : javaisfait sa connaissance avant la guerre, et javais eu locca-sion, depuis août 1914, dapprécier ses talents militaires.Il massura quil ferait tous ses efforts pour que nos re-lations fussent aussi amicales que possible. Cette premièreentrevue me produisit la meilleure impression, et pour nepas perdre de temps, je linvitai à assister le 29 décembreà une conférence à laquelle javais convié les commandantsde groupe darmées et à laquelle devaient assister le pré-sident de la République, le président du Conseil et leministre de la Guerre et devait être discutée lattitudeà tenir sur notre front.

En effet, en ce qui concernait le front français, javaisdéjà prévu certaines précautions permettant de laisserlarmée hiverner en situation défensive sans avoir à re-douter la reprise dune attaque : les mesures qui mavaientparu le plus propres à ce résultat étaient lallégementgénéral du front de façon à grossir le nombre des réserveset des troupes à linstruction ; javais en outre décidé demettre en réserve létat-major de la 2 e armée et de chargerson chef, le général Pétain, de diriger la préparation desréserves aux offensives à prévoir en exécution de la con-férence de Chantilly. En répartissant nos réserves der-rière les parties sensibles du front, il me semblait que nousserions à labri dune attaque brusquée de lennemi.

Cest cette manière de voir que jexposai le 29 à Chan-tilly devant le gouvernement qui sétait inquiété de bruitsdivers doffensive ennemie, et devant le général Haig :à mon avis, en effet, larmée britannique semblait avoirune trop grande densité de troupes sur le front et de tropfaibles réserves ; outre que ces dispositions me parais-saient dangereuses dans lhypothèse dune attaque enne-