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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
En ce qui concerne le général Pau, on avait pu espérerque le prestige qui entourait cette belle figure de soldatserait utile au resserrement des liens entre les deux états-majors ; il n’en fut malheureusement rien : à la Stavka,nos officiers étaient tenus à l’écart et il était très difficilede connaître les projets du commandement russe.
A vrai dire, la lassitude et l'indifférence commençaientà se faire jour dans beaucoup de milieux : de ce côté nousne devions plus avoir que des désillusions.
l’entente avec l’italie
A la conférence de Chantilly, le général Porro, sous-chef d’état-major général de l’armée italienne, avait laisséentendre que les forces italiennes, grâce à un nouvelappel qui avait eu lieu en novembre, seraient renforcéesd’un nombre important de nouvelles unités : douze bri-gades d’infanterie, deux régiments de bersaglieri, vingt-six batteries alpines, soixante-quatorze batteries de cam-pagne et de montagne, cent cinquante batteries de siègeet soixante-quatorze compagnies du génie. Malheureuse-ment, sans doute pour des raisons budgétaires, le gouver-nement italien fut obligé de réduire de moitié environson programme. Et lorsqu’en février 1916, le présidentdu Conseil français se rendit en Italie accompagné dugénéral Pellé, celui-ci fut sollicité par le général Cadorna pour que la France contribuât à l’armement des nouvellesformations et à la constitution des nouvelles batterieslourdes. Lorsque cette demande m’eut été communiquée,j’écrivis, le 22 février, au ministre que j’estimais, en cequi me concernait, que nous pouvions satisfaire aux de-mandes italiennes : en effet, dans ma pensée, il était né-cessaire d’enlever tout prétexte à l’Italie qui puisse l’auto-riser à ne pas donner à son offensive la puissance escomptéepar la conférence de Chantilly.