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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
opérations militaires, selon les intentions du gouverne-ment. »
LES SERBES
Précisément, le sauvetage des restes de l’armée serbe était devenu l’une de mes grosses préoccupations dès lemoment où j’avais pris le commandement général desarmées françaises.
Les conditions dans lesquelles s’était effectuée la re-traite de nos alliés avaient dépassé ce que l’histoire avaitconnu de plus tragique : ayant abandonné, avant des’engager dans la montagne, tout leur matériel roulantet la presque totalité de leur artillerie, bivouaquant dansla neige, harcelés par une population hostile, les restesde l’armée serbe, épuisés, déguenillés, affamés, avaient ce-pendant atteint la région de l’Adriatique où ils formaientdans les premiers jours de décembre deux masses inorga-nisées : l’une dans la région de Scutari-Saint-Jean-de-Medua, l’autre dans la région d’Elbasan-Tirana.
Il s’agissait de ravitailler ces débris lamentables et dereconstituer quelques unités serbes qui puissent encoremettre au service de la coalition les solides qualités dela race serbe (1). Le gouvernement français avait envoyéune mission en Italie qui pût d’accord avec la missionbritannique de l’Adriatique débarquer des vivres à Saint-Jean-de-Medua et à Durazzo . Mais, en raison de la présencede l’ennemi dans la mer Adriatique , le ravitaillement res-tait difficile et c’est à peine s’il était possible de faireparvenir aux Serbes les denrées indispensables pour lesempêcher de mourir de faim. Il était donc indispensablede diriger les divers groupements sur une région moins
(1) Dans un télégramme que le prince Alexandre me faisaitenvoyer, le 11 novembre pour ine remercier de mon intervention enfaveur de la Serbie dans les conseils interalliés, il disait : « Nos soldatssont impatients de pouvoir fraterniser, en défendant nos intérêtscommuns sur le champ de bataille, avec ceux des grands et noblesalliés dont le courage et la valeur sont légendaires. »