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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
effectif continuait à être considéré par lui comme « dési-rable et possible. »
Après des pourparlers avec le gouvernement, je pus en-voyer à Sarrail des instructions pour prendre les disposi-tions de sécurité nécessaires à Salonique . Parmi ces me-sures, Sarrail envisageait de proclamer l’état de siègeà Salonique dès que les Bulgares franchiraient la frontière,comme cela semblait probable : or, une division grecquetenait garnison dans la place, pouvant user de la télégra-phie sans fil et s’en servir pour donner à l’ennemi des ren-seignements intéressants sur l’état de nos forces. Sarraildemandait que, vingt-quatre heures après la proclamationde l’état de siège, cette division ait quitté la zone du campretranché ; j’appuyai sa demande auprès du président duConseil qui exigea du gouvernement grec les garantiesnécessaires.
Toutes ces mesures eurent pour effet d’assurer, du moinsen partie, la sécurité de nos troupes ; mais, d’autre part,il fallait également agir sur le général Sarrail pour l’inviterà entrer dans la voie, désirée par la France et l’Angleterre ,d’une collaboration avec le gouvernement grec. Or, il estcertain que Sarrail dont l’armée avait eu à souffrir detoutes les déloyautés grecques pendant la campagne deSerbie , était peu disposé à user de ménagements envers lesGrecs : il avait fait preuve vis-à-vis d’eux d’une certainerudesse absolument naturelle : refus de ravitaillement,rupture des ponts de chemins de fer, arrestation desconsuls.
Cependant le 31 janvier 1916, pour le modérer, je luienvoyai le télégramme suivant :
Le gouvernement estime que la collaboration de la Grèce doittoujours être considérée comme désirable et possible. Il entendque notre action diplomatique ou militaire comporte les ména-gements susceptibles de réserver et même de préparer cettecollaboration. Vous inspirant de cette directive, il y auradonc lieu désormais de n’entreprendre, sauf bien entendu casde force majeure ou manque de temps pour en référer, aucuneopération militaire susceptible d’être interprétée comme por-