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2 (1932)
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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE

Des mesures ont été prises pour assurer le transport trèsrapide en chemin de fer des réserves du commandant en chef(dans toute la mesure des moyens que laisse à notre dispositionla crise actuelle des transports par voie ferrée).

En définitive, jestime que rien ne justifie les craintes quevous exprimez au nom du gouvernement dans votre dépêchedu 16 décembre.

Mais puisque ces craintes sont fondées sur des comptesrendus, vous signalant des défectuosités dans la mise en étatde défense, je vous demande de me communiquer ces comptesrendus et de me désigner leurs auteurs.

Je ne puis admettre en effet que des militaires placés sousmes ordres fassent parvenir au gouvernement, par dautresvoies que la voie hiérarchique, des plaintes ou des réclamationsau sujet de lexécution de mes ordres. Il ne me convient pasdavantage de me défendre contre des imputations vagues dontjignore la source.

Le seul fait que le gouvernement accueille des communica-tions de ce genre, provenant, soit de parlementaires mobilisés,soit, directement ou indirectement, dofficiers servant au front,est de nature à jeter un trouble profond dans lesprit de dis-cipline de larmée. Les militaires qui écrivent savent que legouvernement fait état de leurs correspondances vis-à-vis deleurs chefs. Lautorité de ceux-ci en est atteinte ; le moral detous souffre de ce discrédit.

Je ne saurais me prêter à la prolongation de cet état dechoses.

Jai besoin de la confiance entière du gouvernement. Silme laccorde, il ne peut ni encourager, ni tolérer des pratiquesqui diminuent lautorité morale indispensable à lexercicede mon commandement et faute de laquelle je ne pourraiscontinuer à en assumer la responsabilité.

J. Joffre.

Lincident se termina par une réponse de Gallieni quiprenait acte de mon explication : « Le gouvernement apleine confiance en vous, mécrivait-il, et son désir dêtrerenseigné sur la situation ne saurait être considéré commeune manifestation de défiance vis-à-vis de vous (1). »

(1) Lettre du ministre de la Guerre en date du 22 décembre 1915.