226
MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
ments rassurants ; il ramassait une division et demie quiétait disponible et lui donnait l’ordre de contre-attaquer,le soir même et le lendemain, pour réduire la pointe faitepar les Allemands sur Fleury : une autre division étaittenue prête pour une action ultérieure, si cela devenaitnécessaire. A aucun moment on n’avait envisagé à Souillyl’éventualité d’une retraite sur la rive gauche de la Meuse ,dont il semblait être question à Bar-le-Duc .
Ainsi donc, la 2 e armée disposait de moyens suffisantset on pouvait entrevoir qu’il serait possible d’enrayerl’offensive allemande. D’ailleurs, dans la soirée, le généralPétain téléphonait à nouveau, et cette fois-ci il envisageaitla situation avec plus de calme : son coup de téléphonecontrastait étrangement avec le précédent. En effet,la lutte se prolongea pendant la nuit et dans la journéedu 24, mais les Allemands, à la suite de nos contre-attaques, furent repoussés aux abords de l’ouvrage deThiaumont, se maintenant seulement dans le ravin desVignes.
Or, à 12 h. 30, je recevais du ministre de la Guerre unesingulière communication téléphonique dans laquelle ilme demandait de ne retarder à aucun prix l’attaque an-glaise et me rappelait toute la responsabilité que j’encou-rais : il m’annonçait en outre, qu’il irait le lendemain àVerdun pour se rendre compte de la situation.
Précisément, deux heures plus tard, le président duConseil passait en gare de Chantilly; j’allai l’y saluer etj’en profitai pour lui marquer mon étonnement d’une tellecommunication.. M. Briand m’apprit que l’envoi de cemessage avait été provoqué par le président de la Bépu-blique qui s’était montré, au Conseil des ministres, trèsimpressionné par la nouvelle des attaques du 23. Celam’était confirmé le soir même par M. Albert Thomas queje recevais à dîner. Après avoir parlé du ravitaillementen munitions et en canons, je tins à représenter au ministretous les inconvénients de l’ingérence du gouvernementdans la conduite des opérations. M. Albert Thomas convintavec moi que le message du général Boques était d’autant