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2 (1932)
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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE

Jai dit dans un chapitre précédent que le but le plusintelligible quon ait pu prêter au commandement alle-mand dans son offensive contre notre place forte de lEst,cétait duser nos réserves pour interdire à larmée fran-çaise de participer aux offensives ultérieures sur notrefront. Inversement, le but que je me suis fixé, dès que labataille de Verdun entra dans sa phase évidente de luttedusure, fut de conduire cette opération défensive soussa forme la plus économique.

La cpnférence de Chantilly me donnait le droit dedemander aux Anglais dattaquer, pour soulager la pres-sion qui sexerçait sur nous à Verdun . Si je ne fis pas jouercette clause, ce nest pas par une vaine forfanterie, pourmontrer au monde que la France était de taille à releverune fois de plus le gant qui lui était jeté. Sil y avait eudanger de catastrophe, jaurais certainement fait appel auxAnglais et je suis sûr quils auraient répondu à mon appel.Mais je savais quils nétaient pas prêts. Ni leur matériel,ni le nombre de leurs réserves, ni le degré de préparationde leurs troupes ne mettaient le général D. Haig en étatdentreprendre quelque chose defficace. Les engager pré-maturément en faisant appel à leur honneur et à leur espritde solidarité, cétait tuer dans lœuf la bataille que nousdevions mûrir ; cétait faire le jeu de lennemi. Et ce que j'aidit sur linfluence de leurs politiciens, suffirait à fournir lapreuve de ce que javance. « Après avoir perdu 50 à60 000 hommes, comme le disait Davidson, larmée anglaisenaura plus la permission dattaquer dici la fin de lannée. »

Je me contentai donc de demander aux Anglais de mecréer des disponibilités, en relevant notre 10 e armée. Cétaitdu reste une question déjà admise en principe par legénéral Haig, antérieurement à la bataille de Verdun. Cetteaide indirecte, demandée par moi le 22 février, ne se fit pasattendre. Dès le lendemain le général Haig me réponditque non seulement il avait donné des ordres pour releverimmédiatement la 18 e division française et ultérieurementle 17 e corps, mais quil comptait, en outre, faire unedémarche personnelle à Londres afin dobtenir lenvoi de