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Au reçu de cette lettre je fis téléphoner au ministrede la Guerre pour lui demander de venir me voir à monquartier général.
Tl arriva le 15 à 9 h. 30. Il était de très méchante hu-meur. Il me dit que ma lettre avait fait très mauvaiseimpression à Paris , et que c’était sur le conseil du pré-sident de la République qu’il me la rapportait, me priantinstamment de la reprendre.
Après l’avoir écouté patiemment, je lui exposai monpoint de vue. Dans l’affaire qui nous divisait, il y avait,lui dis-je, deux questions, l’une de principe, l’autre defait.
Sur la question de principe, je maintins mon opinion,à savoir que je ne voyais que des inconvénients à ce quele gouvernement pût recueillir par-dessus ma tête, et àmon insu, des avis, des demandes ou des plaintes, et c’estce qui m’amenait à demander que chaque fois que lePrésident ou le ministre se déplacerait dans la zone desarmées, ce fût accompagné par moi ou par mon chefd’état-major général.
Sur la question de fait, je demandais au ministre quele voyage du Président fût remis jusqu’à un moment oùil me serait possible de l’accompagner.
Après une assez vive discussion, Roques finit par com-prendre que j’avais encore sur le cœur l’incident récentprovoqué par les comptes rendus que lui avait faits legénéral Pétain à la fin du mois précédent, et il admit quede pareils incidents ne pouvaient qu’être néfastes pour laconduite des opérations. La question fut donc résoluedans le sens que j’avais demandé. Il fut décidé que lePrésident et le ministre seraient toujours accompagnéspar moi ou mon délégué, quand ils viendraient visiterles armées.
Quant à la question de fait, le programme du déplace-ment à Verdun et dans la Somme fut maintenu. Le géné-ral de Castelnau se trouvait dans l’Est. Je lui fis télégra-phier de se rendre aussitôt à Verdun et de s’y mettre auxordres du Président.