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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
dant en chef, et on s’explique qu’il se soit laissé aller peuà peu à décentraliser sa bataille pour la réduire à desactions partielles que dirigeaient les commandants de corpsd’armée et de divisions. Pour remonter ce courant, ilfallait entraîner nos alliés dans une action d’ensemble.J’écrivis, le 11 août, dans ce sens, une lettre à Haig, queje lui fis remettre par le général des Vallières.
Enfin, il y avait chez les Anglais, comme chez nous,l’action retardative des politiciens. On n’a pas oublié laconversation caractéristique qu’avait eue à ce sujet legénéral Davidson avec le général des Vallières. Et je medemandais avec inquiétude si les fortes pertes subies de-puis le 1 er juillet par nos alliés n’allaient pas provoquerune intervention brutale des politiciens d’outre-Manche.
Dans ce dernier ordre d’idées, j’eus une agréable sur-prise. Le 12 août, je partis de mon quartier général dansla matinée avec le président de la République. Nousdevions aller retrouver à Val-Vion le roi d’Angleterre quivenait de France pour visiter ses armées. Nous arrivâmesà 12 h. 30 à Doullens et nous déjeunâmes avec le roi.Haig et Foch assistaient à ce déjeuner. Après le déjeuner,le roi reçut le Président, puis il m’accorda une audienceparticulière à laquelle assista le général Haig. Enfin ilreçut le général Foch.
Sa Majesté se montra avec moi d’une très grande bien-veillance. Elle m’affirma sa confiance personnelle et cellede toute la nation anglaise, en moi. Elle affirma avecforce le désir unanime des Anglais de continuer la luttesans arrêt, sous ma haute direction. Les bruits d’aprèslesquels l’offensive aurait été ralentie sur la Somme parl’intervention du gouvernement britannique, se trouvaientainsi réduits à néant.
Le général Haig s’entretint ensuite avec moi. Il avaitreçu ma lettre, le matin même, des mains du général desVallières. Il en acceptait tous les termes, en particulierle principe de la coordination étroite des efforts anglo-français par des attaques dont la date et les objectifsseraient fixés par moi.