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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
Je partis de Chantilly, dans mon train spécial, le 27à 20 h. 30, accompagné seulement de mes deux officiersd’ordonnance, les commandants Moyrand et Thouzelier.
Le 28, à 7 h. 30, j’eus un entretien avec le généralPétain à son quartier général de Nettancourt puis, à8 heures, je partis pour Souilly où je trouvai le généralNivelle qui m’accompagna au cours de ma tournée. Nousallâmes d’abord à Dugny, où je trouvai réunis les com-mandants de groupements de la rive droite : Paulinier,Lebrun, Baret et Mangin. D’accord avec Nivelle, j’avaisdécidé que le général Mangin qui commandait le secteurle plus délicat, et dans lequel j’avais la plus entière con-fiance, serait maintenu dans son commandement que j’avaissongé à passer au général Grossetti, Mangin étant des-tiné à passer avec son état-major à l’armée Fayolle. Cedernier, de bonne grâce, reconnut l’avantage de se priverdes services de Mangin qui connaissait maintenant à fondson secteur de Verdun .
Je notifiai à Mangin ma décision, et lui dis que je comp-tais sur lui. Je mis ensuite les commandants de groupe-ments au courant de la situation générale. « L’ennemi,leur dis-je, en substance, est partout saisi à la gorge ;la consigne est de ne pas le lâcher. » Je pris note des de-mandes qui me furent faites par les généraux, et lesinvitai à me faire des propositions exceptionnelles pourla Légion d’honneur en faveur de sous-officiers et de sol-dats. Je comptais sur cette haute récompense pour rendreaux troupes de Verdun le haut moral que la lutte terriblequ’elles menaient avait quelque peu émoussé.
Dans l’après-midi, je vis les généraux Deletoille à Ram-pont, de Maud’huy à Ville-sur-Cousance, Hallouin à Ra-recourt, qui commandaient les secteurs de la rive gauche.Partout l’impression de détente était manifeste dans lesétats-majors. Chacun reconnaissait que l’offensive de laSomme avait produit son effet. L’activité de l’artillerieavait beaucoup diminué depuis le 12 juillet; elle étaitredevenue « normale », sauf dans le secteur de Froide-terre-la Laufée où elle continuait à être grande. Le gé-