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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
parlers que je venais d’entamer avec l’état-major impérialanglais .
Le 2 mai, je reçus le nouveau plan du commandant del’armée d’Orient, si tant est qu’on puisse dénommer cedocument un plan nouveau : le général Sarrail y reprodui-sait le plan précédent. L’étendue de son déploiement stra-tégique était d’autant plus démesurée que je l’avais pré-venu qu’il ne pouvait pas compter sur le supplément desix divisions nouvelles qu’il demandait. Dans ces condi-tions, s’étaler uniformément sur tout son front, c’étaitvouloir renoncer à profiter de l’avantage que l’initiativede l’attaque pouvait lui conférer sur la partie du frontennemi qu’il aurait choisie. Je lui en fis l’observation partélégramme du 6 mai. Le lendemain, Sarrail me répondaiten maintenant ses conclusions.
C’est dans cet état que la question fut débattue dansun entretien que j’eus avec le général Robertson (1) àBeau-quesne (2).
L’échec fut immédiat et complet.
Tout d’abord, Robertson me déclara que le gouverne-ment britannique repoussait l’idée d’envoyer de nou-velles forces anglaises en Orient. Robertson, allant jus-qu’au bout de sa pensée, me suggéra même l’idée de rap-peler deux divisions anglaises de Salonique « où elles neferont rien » et « qui seraient très utiles sur le front fran-çais (3) ». Enfin, Robertson ne se faisait pas faute de dis-cuter le plan de Sarrail, et j’étais mal placé pour défendreun plan dont les fondements m’étaient apparus dès l’abordà moi-même si critiquables.
(1) Robertson m’avait témoigné le désir d’examiner avec moi leplan des opérations à entreprendre en Orient :
Je lui écrivis le 11, pour lui dire que le général Sarrail venait dem’adresser son projet et que je serais heureux de profiter de cetteoccasion pour m’entretenir avec lui de la date des offensives géné-rales
(2) Du côté anglais , le général D. Haig, du côté français, le généralde Castelnau assistaient à cette conférence.
(3) Le résumé de cette entrevue du 26 mai figure dans les docu-ments du grand quartier général français (3 e bureau)