l’armée d’orient
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Du coup, je vis le moment où le maintien de notre corpsexpéditionnaire de Salonique allait être remis en question.
Tandis que nous discutions, l’ennemi, mettant à profit lesdélais que nous lui laissions, agissait. Dans les premiersjours de mai, les Bulgares, franchissant la frontière grecque,s’emparaient sans coup férir, avec la connivence des Grecs,du fort de Rupel et des hauteurs bordant la rive gauchede la Strouma . Cette offensive bulgare aggravait singu-lièrement la situation de l’armée d’Orient. EUe montraitsurtout jusqu’à l’évidence que le gouvernement grec avait,en sous-main, lié partie avec les Bulgares. Qu’arriverait-ilsi cette hostilité souterraine se transformait en hostilitédéclarée? Aussi, le 2 juin, je signalai au président du Con-seil l’urgence qu’il y avait à obtenir du gouvernementbritannique une décision conforme à nos vues. Ma demandedétermina le président du Conseil, M. Briand, à se rendreà Londres avec le ministre de la Guerre et moi. Nous nousembarquâmes le 9 juin à 2 heures du matin, à Boulogne,et débarquâmes à Folkestone à 4 heures et demie. Dèsnotre arrivée, nous eûmes une première réunion à DowningStreet , chez M. Asquith. L’après-midi, nous fûmes pré-sentés, au palais de Buckingham , au roi George qui nousreçut avec son amabilité coutumière. De 15 h. 30 à 18 h. 45,nous tînmes une deuxième réunion. Les principaux mi-nistres anglais , les généraux Robertson et Haig y assis-tèrent. Nos délibérations, pas plus celles du matin quecelles de l’après-midi, n’amenèrent aucun rapprochemententre les points de vue. Abstraction faite de paroles cour-toises échangées et de très gracieuses marques de sympa-thie dont nous avions été l’objet, nous repartions le soirde Londres , les mains vides. On avait décidé que touteoffensive à Salonique serait différée. Le seul bénéfice quenous emportions de ce voyage, c’est que le gouvernementanglais admettait la nécessité de hâter l’équipement del’armée anglaise d’Orient, conformément à la décisionprise le 12 mars à Chantilly. Et d’ailleurs, cette décisionne fut exécutée qu’avec une extrême lenteur ; le 21 juin,le Comité de guerre britannique précisait que l’équipe-