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MÉMOIRES DU MARÉCHAL J OFFRE
J’ai dit dans un chapitre précédent (1) qu’à la suitedes démarches de M. Doumer lors de la mission qu’il avaitremplie en Russie au début de 1916, le gouvernementrusse, qui avait un excédent d’hommes dont il ne pouvaitassurer l’armement et l’équipement, avait accepté d’en-voyer six brigades d’infanterie en France .
Le 20 juin je me rendis au camp de Mailly pour passeren revue une brigade russe qui venait d’y arriver pour yachever son instruction sous la direction d’officiers fran-çais. C’était une fort belle troupe. Les hommes étaientjeunes, vigoureux, un peu massifs, mais respiraient lasanté et la bonne humeur. Les compagnies étaient à effec-tif de 250 hommes, et un dépôt global de 2 000 hommesétait destiné à maintenir les unités à ce chiffre.
Au cours de la revue, je saluai, selon l’usage russe, chaquebataillon en arrivant à sa hauteur. Les hommes répon-daient en chœur à mon salut par un salut réglementaire ;pendant le défilé qui suivit, les hommes tournaient latête avec un ensemble parfait. Cet échange de paroleset de regards entre le chef et la troupe ne manque pasde grandeur.
A cette revue assistait une mission dirigée par le gé-néral Romanowski, qui devait passer quelques jours àla 4 e armée française, et le colonel lgnatief, attaché mi-litaire russe.
D’après les renseignements qui me furent donnés, labrigade russe travaillait avec zèle à son instruction. Tou-tefois, l’éducation des spécialités présentait quelques diffi-cultés, les cadres russes ayant une invincible préférencepour le rang serré plutôt que pour les exercices de combat.
En tout cas, cette belle troupe me fit très bonne impres-sion et j’adressai le lendemain au général Alexieefî un télé-gramme pour le féliciter de la belle tenue de la brigadequ’il venait de m’envoyer et qui me faisait bien augurerde l’état de nos alliés.
Malheureusement cette belle brigade me réservait une
(1) 4' partie, chap. i er , p. 177.