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MÉMOIRES DU MARÉCHAL JOFFRE
menacé, des mesures de précaution. Et surtout, sur lefront russe, l’aide allemande l’avait sauvée d’une catas-trophe imminente, et l’équilibre commençait à se ré-tablir.
J’ai montré, par la courte esquisse que j’en viens dedonner, comment je me suis efforcé de conjuguer lesactions des Russes et des Italiens dont les fronts étaient siintimement dépendants l’un de l’autre. Et le seul énoncédu problème que je travaillais ici à résoudre suffirait àmontrer combien l'organisation de la direction militaire del'Entente était encore à ce moment précaire.
Il ne rentre pas dans mon intention de faire un récitde la campagne qui se déroula en 1916, chez nos nou-veaux alliés. Je veux simplement montrer dans quellesconditions et sous quelle forme mon action s’exerça surces forces nouvelles.
Pour bien comprendre ces événements, il importe dereprendre l’esquisse des opérations russes.
J’ai dit, plus haut (1), que le général Gilinski étaitvenu me communiquer le 18 mai le projet d’opérations duhaut commandement russe. Ce projet comportait uneattaque centrale au nord des Marais du Pripet, partant dela région de Minsk et visant l’important nœud de com-munications de Baranovitcb, et deux attaques secondairesd’ailes, l’une sur le front de la Duna, dans la région deDvinsk, l’autre dans la région de Rovno, en direction deLemberg. C’est cette dernière attaque que, pour soulagerl’Italie, les Russes avaient lancée avant la date fixée.En raison du succès dont elle fut couronnée dès le début,nos Alliés lui donnèrent aussitôt une grande extensionvers le sud, et le front autrichien ayant été successive-ment rompu à Loutsk ( 4 juin), sur la Strypa (le 6), en
(1) Voir 4° partie, chap. IV, p. 285.