DÉJEUNER AVEC BRIAND
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président du Conseil fit donc appel à mon patriotisme poursauver le gouvernement, en acceptant les modificationsprofondes qu’il allait m’exposer. Et il termina son préambuleen affirmant que, s’il se présentait le lendemain devant leComité secret de la Chambre sans annoncer cette réforme,le ministère serait balayé.
Le plan de M. Briand était le suivant :
Je serais chargé de la direction de la guerre; j’auraisauprès de moi un état-major et des représentants desarmées alliées. Je n’exercerais plus directement le com-mandement des armées françaises du Nord-Est, qui seraitconfié à un officier général qui ne serait désigné que lorsquej’aurais donné mon avis sur celui qui me paraîtrait leplus digne de cette lourde charge. En somme, j’aurais ladirection générale de la guerre et mon action s’étendraità la fois sur le général commandant en chef des armées duNord-Est et sur le général commandant en chef Varméed'Orient. Mon autorité s’exercerait de Paris , où je serais encontact intime avec le gouvernement, et, pour la renforcer,M. Briand m’annonça ma prochaine élévation au maréchalat.
Ces propositions étaient pour moi une révélation. Riendans mes entrevues antérieures ne m’avait laissé prévoirque ce plan eût germé dans les conseils du gouvernement.Je répondis au président du Conseil que j’étais prêt à m'in-cliner devant les décisions gouvernementales , qu’en mili-taire que j’étais, j’avais dans ma carrière assez pratiquél'obéissance pour obéir au devoir nouveau qu’on me pré-sentait. Mais je tins à préciser que, loin de provoquer laréalisation de réformes dont le bâton de maréchal devaitsanctionner Vacceptation, je me bornerais à les subir, carje voyais de graves inconvénients à ce plan.
Il est certain qu’au premier abord, ce projet paraissaitlogique. De même qu’un commandant de corps d’arméene doit pas commander directement une de ses divisions, ilparaissait normal que le commandant en chef des arméesfrançaises n’exerçât pas lui-même le commandement desarmées qui opéraient sur le théâtre du Nord-Est. Mais cettelogique n’était qu’apparente. Il y avait une telle dispro-