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bois et les villages qui constituent les. points d’appui,les centres de résistance du champ de bataille, avaient sibien disparu, qu’on en cherche aujourd’hui encore, vaine-ment la trace sur le sol.
Au Chemin des Dames, où le général Nivelle allaittransporter la bataille, les organisations adverses étaientsolides, les villages étaient encore partiellement debout,les caves et les abris étaient intacts. Pouvait-on espérerdétruire ces organisations au cours de la préparation, lestraverser d’un seul élan et transporter en un jour la lutteen rase campagne?
Si l’attaque décisive et foudroyante que rêvait le géné-ral Nivelle avait été lancée dans la Somme, j’aurais admisqu’on fondât sur elle les plus grandes espérances, car on seserait trouvé dans des conditions analogues à celles deVerdun , c’est-à-dire en face d’un système de fortificationsennemies désorganisé, incomplet, et par endroits, même,entièrement détruit.
On a souvent comparé, assez justement d’ailleurs, laguerre de tranchées qui nous fut imposée par les circons-tances, au siège d’une place forte. Sur la Somme, nousavions fait dans la muraille ennemie une brèche assezlarge pour qu’on pût envisager d’y lancer nos colonnesd’assaut. En attaquant au Chemin des Dames, on allaitdonner de la tête contre une partie intacte de cette muraille.C’était jouer la difficulté et se préparer une terrible dé-convenue.
On me dira qu’il est facile aujourd’hui de faire la cri-tique d’événements malheureux qui nous sont mainte-nant connus. A cela on peut répondre que mon raisonne-ment ne perd rien de sa valeur et que je ne suis pas leseul à l’avoir fait. Sans avoir suivi de près les innombrableset stériles discussions auxquelles le général Nivelle futobligé de se livrer en présence des membres du gouverne-ment, il est aujourd’hui de notoriété publique que, chezles exécutants, des chefs comme le général Pétain et legénéral Micheler , qui commandaient l’un et l’autre desgroupes d’armées et qui avaient une indéniable expérience